La « mutti » tire sa révérence après 16 ans de règne : Le fabuleux destin d’Angela Merkel

Retour sur le parcours atypique de celle qui a marqué l’histoire de l’Allemagne, mais aussi de l’Europe, depuis 2005

Dimanche 26 septembre 2021 a marqué définitivement la fin de 16 ans de règne de la chancelière allemande Angela Merkel qui a quitté son poste sur une défaite de son parti.

Pourtant, Angela Merkel a marqué aussi bien l’histoire de l’Allemagne mais aussi de l’Europe et par ricochet celle de la France. Cette femme politique qui a côtoyé 4 présidents français a connu un destin hors norme en régnant sans interruption sur l’Allemagne depuis 2005.

Lorsqu’elle a été élue, Jacques Chirac était alors président de la République française. Alors que ce dernier a laissé sa place à Nicolas Sarkozy en 2007, elle était toujours en poste. En 2012, quand François Hollande succédait au président sortant, Merkel continuait de conforter sa place de chancelière. Et enfin en 2017, lorsque le jeune Emmanuel Macron devenait président, Merkel était toujours là.

– Premier signe de faiblesse en 2018

Pourtant, ces dernières années, des échecs ont aussi marqué la vie politique d’Angela Merkel qui a dû quitter la présidence de son parti Christlich Demokratische Union Deutschlands (CDU – Union chrétienne démocrate d’Allemagne), après des élections régionales décevantes en Bavière et dans la Hesse. Suite à ces résultats, elle laissa son fauteuil à Annegret Kramp-Karrenbauer. Pourtant la nouvelle dauphine de Merkel n’aura pas autant de longévité que son mentor puisqu’elle se retirera de la présidence début 2020 au profit d’Armin Laschet. Actuellement c’est lui qui mène la bataille et pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, le parti CDU passe sous la barre des 30%. Pas si sûr que le nouveau patron de la CDU puisse tenir le parti aussi longtemps que la chancelière.

– La vie de Merkel

Angela Dorothea Kasner est née le 17 juillet 1954 à Hambourg dans l’Allemagne de l’Ouest les deux Allemagne étant encore séparées. Quelques semaines après la naissance d’Angela, la famille s’installe en République démocratique allemande (RDA) où le père, membre de l’Église protestante du Brandebourg, prend en charge la petite paroisse de Quitzow, dans le nord du pays, près de la ligne de séparation entre les deux Allemagnes.

Née d’un père pasteur et d’une mère professeure d’anglais, rien ne la destinait à un fabuleux destin politique.

Après ses études de physique puis de doctorat en chimie quantique à Berlin-Est, elle épousera le physicien Ulrich Merkel, dont elle divorce en 1982. Curieusement, elle gardera son nom même après son nouveau mariage avec le professeur de chimie Joachim Sauer en 1988.

Après la chute du mur, Angela Merkel adhéra en 1989 au Renouveau démocratique (Demokratischer Aufbruch -DA) et devint en 1990 vice-porte-parole du premier et dernier gouvernement librement élu de la RDA. En 1991, le parti fusionne avec la CDU.

Elle commencera à se faire parler d’elle, notamment quand l’emblématique chancelier Helmut kohl la prendra sous ses ailes en la nommant ministre de la Condition féminine et de la Jeunesse en 1991 et restera à ce poste jusqu’en 1994.

Son ascension se poursuivra lorsqu’elle deviendra ministre fédérale de l‘Environnement après la victoire de la CDU/CSU aux élections de 1994.

Suite aux débâcles de son parti en 1998 aux élections du Bundestag, Angela Merkel sera promue présidente de la CDU le 10 avril 2000 alors qu’elle était déjà secrétaire générale du parti.

Mais il faudra attendre 5 ans pour que le Bundestag élise Angela Merkel première chancelière dans l‘histoire de l’Allemagne. Ainsi, elle prêtait serment le 22 novembre 2005 devant le président du Bundestag Norbert Lammert et dirigera une coalition composée de la CDU/CSU et du SPD.

Quatre ans plus tard, Angela Merkel gagnera ses premières élections même si cette fois-ci, elle composera un nouveau gouvernement de coalition avec le Parti Libéral Démocrate (FDP).

En 2013, elle obtiendra une nouvelle victoire et recomposera la troisième grande coalition entre la CDU/CSU et le SPD dans l’histoire de l’Allemagne.

Enfin, sa dernière élection date de 2018 où la coalition reste en place.

– Merkel et la gestion des crises

La première grande crise qu’a connu Merkel date de 2008. C’est la « crise financière » durant laquelle des millions de ménages américains ne pouvaient plus rembourser leurs prêts immobiliers. Une crise qui affecta les établissements financiers jusqu’en Europe.

Mais, Angela Merkel gérera la grave crise économique et financière de 2008, se forgeant alors l’image d’une chancelière protectrice des Allemands et de leur argent. Même si son plan de sauvetage de l’Euro est beaucoup décrié, elle assurera une certaine stabilité dans le pays.

De même, alors qu’elle avait annulé la sortie de nucléaire de l’Allemagne en 2010, elle annoncera, le 9 juin 2011 la fin de l’énergie nucléaire de son pays, après l’accident de Fukushima.

En 2015, elle avait fait voir de toutes les couleurs à la Grèce en refusant le plan de sauvetage voté par les Européens. En effet, elle avait promis aux Allemands que son plan de sauvetage de l’Euro de 2010 ne leur coûtera pas un centime. Elle avait alors obligé le Fonds Monétaire International (FMI) à s’impliquer directement dans ce plan en se portant garant.

La même année, l’Europe faisait face à une vague massive d’immigration venue de Syrie. Elle avait alors trouvé un accord avec la Turquie en obligeant l’Union européenne à avancer sur le dossier de l’adhésion de la Turquie dans l’Union ainsi qu’à rembourser à la Turquie une partie des sommes engagées pour stopper l’immigration.

Enfin, elle doit également faire face à la crise de la Covid-19. Malgré une imposante campagne de vaccination, des restrictions sévères sont en place et des manifestations défient les autorités.

Dans ce climat, non seulement la popularité de Merkel baisse mais également celle de son parti. D’après les premiers résultats, non seulement le parti passe sous la barre des 30% mais aussi arrive en deuxième position derrière le SPD avec un peu moins de 25%.

En tout cas, après 16 ans de règne aussi bien sur l’Allemagne que sur l’Europe, « la mutti » (maman) a tiré sa révérence ce dimanche.

Elle restera la femme qui a marqué l’histoire de l’Allemagne. Pas si sûr que son parti se redresse après son départ.

Fatma Bendhaou